• Chapitre 1 : l'Enfer de Gameard

    Royaume Triliga, 1393 ans après l'arriver des humains sur Alona. La chaleur dans le sud du royaume était étouffante. On trouvait beaucoup de petits hameaux milieu des grands champs cultivés. Mais un peu plus loin, en bordure du désert des Pierres de Feu, se trouvait une immense cité : Gameard. Les Pierres de Feu formaient la frontière naturelle entre Mentis et Triliga. Personne ne se risquait à traverser cet abysse en mouvement continuel, créant des lacs de lave, faisant jaillir des geysers et à l'air saturé de souffre. Chaque années, la Terre des Chimère s'éloignait de celle de hommes. Chaque année, le continent de Limlya s'agrandissait. Chaque année, les Pierres de Feu renforçait la frontière qui séparait ces deux peuples qui se haïssaient viscéralement. Les habitants de Gameard ne s'en portaient pas plus mal.

    Première cité du royaume par sa taille, deuxième par son nombre d'habitant. Et première par sa pauvreté, ses crimes et ses vices. Ici, plus que partout ailleurs dans l'empire, et sûrement même dans le monde, le métissage été fort, même si le sang humain dominait. On voyait se balader dans les larges rues des quartiers riche, des hommes très fin, à l'apparence presque androgyne, les bras et le torse couvert de minuscules écailles luisantes. Le sang de sirène coulant dans leurs veines donnait un air délicat à ces maîtres de l'eau qui monopolisaient souvent le peu d'humidité de la ville pour éviter que leur peau ne se dessèche. Ici, cette femme trapue et musclée, assez petite, qui faisait voler ses cheveux sous un vent inexistant, devaient avoir quelques ancêtres nains. Là, un homme étrange, à la peau blafarde et aux yeux entièrement noirs faisait un coure assidue à une femme élégante, dont des oreilles pointues dépassaient de ses longs cheveux blond.
    Dans le quartier marchand, les gens parlaient, marchandaient, criaient, s'interpellaient, hurlaient et produisaient tout un tas de sons indescriptibles dans une grande cacophonie. Un gros chient gris vola discrètement un morceau de viande sur un étalage, puis couru se réfugier dans une ruelle sombre avant que quelqu'un ne s'aperçoive du vol. Sitôt à l’abri, il se transforma en un beau jeune homme qui entrepris immédiatement de dévorer son larcin. Une jeune fille à la peau couleur cendre tenait un étale de reptiles somnolant devant lequel s'arrêtait des badauds de tous les horizons. Une diversité incroyable se retrouvait partout dans cette ville. Mais les vices de toutes sortes étaient omniprésents, particulièrement dans les bas fonds de la cité. On y trouvait des femmes dont les vêtements déchirés reflétaient encore une richesse passé, des enfants aux os saillants volant un peu de nourriture sur les maigre étales posés le long de la rue, des hommes l'air hagard qui comptaient désespérément les quelques pièces qui leur restait... Les rues étaient salle, si étroites que le soleil avait du mal à y glisser ses rayon, ce qui était appréciable par cette chaleur. De chaque côté des ruelles en terre battue se trouvaient des établissements de toute sorte : Taverne, échoppe, maison de passe, armurier clandestin... Les forces armées de la ville descendaient quelque fois par ici pour essayer d'y mettre un peu d'ordre. Mais dès que quelqu'un était arrêté, quelqu'un d'autre prenait sa place. Et le taux de criminalité déjà élevé de la citée était largement dépassé. Chaque matin, on retrouvait des cadavres, souvent atrocement mutilé, et dont la moindre possession avait déjà été volé. Cette ville était magnifique, surprenante. Et c'était un véritable coupe gorge.

    Inori poussa un soupir de lassitude et ferma la fenêtre, pour garder le peu de fraîcheur de la pièce en cette mâtiné étouffante. La jeune fille rassembla ses long cheveux noirs en un chignon et se laissa tomber sur le lit faisant face au miroir. Le miroir... Que n'aurait-elle pas donner pour pouvoir briser cette abomination ou se reflétaient les clients couvert de sueur, dont les mains dures la pétrissaient chaque jour et chaque soir avec avidité ? Mais ça, son maître ne le lui aurait pas pardonner, et elle préférait éviter de finir le mois avec des os cassés. Elle en aurait pleuré de rage et d'impuissance. Elle n'avait que treize ans, mais même si elle savait que beaucoup de gamines de son age se donnaient à la prostitution pour pouvoir survivre, elles n'étaient pas contrainte, à par peut être par leur estomac, de subir ce vice chaque jour, depuis plus de trois ans... Depuis plus de trois ans elle était enfermé dans cette pièce sombre, n'ayant pour seul meuble un grand lit et un vieux miroir. Une fenêtre donnait sur la rue animée, et dans le fond une petite porte était presque toujours fermé à clef, sauf quand elle recevait un client... Sa seule échappatoire était cette fenêtre... C'est ce qu'elle aurait fait, si ce maudit collier n'était pas accroché autour de son cou. Sa liberté ne se jouait qu'à une simple bande de cuir. Elle ne comprenait pas son fonctionnement, mais il l'empêchai d'utiliser son élément et son esprit... Pire, quitter cette chambre sans l'autorisation de son maître signifiait la mort par étranglement. De désespoir, elle donna un coup de poing dans le mur. Elle résisterait. Elle n'était pas, comme tous ses clients, une bâtarde ayant dans ses veine le sang de tous les peuples vivant sur ce monde. Non, elle était humaine ! Son sang était aussi pur que celui de ses ancêtres terrien qui étaient arrivé sur cette planète il y a plus d'un millier d'années. Elle avait gardé les traits des asiatiques avec ses cheveux noirs et lisse, son visage assez plat, sa petite taille et ses yeux bridés.

    Des pas montant lourdement les escaliers la tirèrent de ses sombre pensées.
    -Inori ! Un client !
    La voix de son maître.
    Toujours autant de douceur, songea-t-elle aigrement. Elle se débarrassa de la légère robe blanche qu'elle portait et s'assit sur le lit. Ce ne fut pas long, une clé tourna dans la serrure et un homme entra dans la pièce. Grand, ses longs cheveux blonds étaient attachés par un lien de cuir. Ses yeux d'un bleu profond la détaillèrent longuement puis il s'approcha
    -Tu es magnifique.
    Elle haussa les épaules. Si au moins elle avait pu être moche, elle n'en serait pas là. Enfin bon, celui là avait l'air relativement propre, ce ne serait donc peut être pas trop désagréable...
    -Mais c'est bien dommage qu'une si petite chose doive se réduire à ça pour vivre, reprit-il.
    Nouveau haussement d'épaule. Si ça n'avais tenue qu'a elle, il y a longtemps qu'elle serait partie. Tout valait mieux que la prostitution. Mais étant esclave, elle n'avait pas vraiment le choix...
    -T'aurait-on coupé la langue ? Vu ton prix, j'espère pas.
    Pour toute réponse, elle lui tira la langue. Il ne pouvait pas se dépêcher un peu ? Plus vite il aurait finit, plus vite elle serait tranquille. Il sourit.
    -Voilà une petite fille bien grossière. Je vais devoir t'apprendre les bonnes manières.
    Se penchant sur elle, il lui murmura à l'oreille :
    -Je suis demi-elfe si ça t'intéresse...
    Non, ça ne l'intéressait pas ! Sentant qu'il n'en tirerai pas un mot, il grogna et la poussa dans le lit avant de se défaire de ses vêtements.
    -Vraiment... Tu es trop impatiente...
    Alors que des mains avides exploraient son corps, elle ferma les yeux, faisant taire sa fierté. Son esprit se révoltait, mais son corps s'inclinait. Que pouvaient-elle faire de toute façon ? Lutter était inutile, elle l'avait appris à ses dépends. Alors, comme toujours, elle se laissa faire, l’horrible miroir renvoyant son expression dégoutté.

    Plus tard, épuisée, elle fixait le plafond sans le voir tandis que le demi-elfe se rhabillait. Pourquoi ? Pourquoi devait-elle subir cela ? L'homme s'assit à côté d'elle et essuya avec douceur une larme qui avait coulé sur sa joue. Elle ne lui fit même pas l'honneur d'un regard. Il soupira, caressa une dernière fois son ventre avant de se lever.
    -Tu sais, je viens peut être de te délivrer.
    Il ouvrit la porte.
    -Après, c'est à toi de l'accepter... Adieu petite fille.
    Elle ne répondit pas. Personne ne pouvait la délivrer de cet enfer.
    Quelque minutes plus tard, la porte s'ouvrit de nouveau, sur une vieille femme, portant une serviette et une bassine d'eau. Depuis trois ans, elle s'occupait d'elle. Si Inori n'avait jamais su son nom, elle la considérait un peu comme sa grand mère. Elle déposa son chargement et ressortit sans dire un mot. La jeune fille se lava comme elle put et remis sa robe. La vieille dame revint avec une décoction de plante et une assiette contenant une tranche de pain, quelque légume et un morceau de viande. Son repas de la journée. Elle pris la nourriture en marmonnant un vague merci et la «grand mère» repris la bassine et la serviette avant de la laisser seule.
    Inori s'assit par terre et commença à manger sans appétit. La maison de passe tenue par son maître, Narkrin Orgs, n'était pas très renommé et ses clients étaient surtout des habituer, ainsi que quelque voyageurs qui s'aventuraient parfois dans ces quartiers dangereux. Inori était la plus jeune, la seule esclave, et le « produit » préféré. La prostitution infantile était interdite dans le royaume, mais c'était si facile de capturer des gamines que peu de gens respectait cela, et encore moins ici. Après avoir picoré quelques morceaux de légume, elle repoussa son assiette et pris la tasse encore chaude. Cette décoction l'empêchait de tomber enceinte. Il y avait au moins un point ou elle était d'accord avec son maître: Elle ne voulait surtout pas d'enfant. Et lui non plus ne voulait pas avoir à nourrir une bouche inutile. Alors qu'elle portait l'amer breuvage à ses lèvre, le visage du demi elfe lui revint en mémoire. Pourquoi-lui ? Il n'était pas comme beaucoup d'autre qui se jetaient sur elle avec avidité pour assouvir leurs instincts. Peut être le peuple des forêts lui avait-il appris à respecter les femmes, comment ils respectent la nature... Au moins, elle avait pour une fois apprécier de passer un peu de temps avec un homme. Elle secoua la tête et chassa son image de son esprit. Il était partit et ne reviendrait pas, alors à quoi bon se rappeler de cette mâtiné ? Elle but une gorgée, le liquide chaud lui brûla la gorge. «Je viens peut être de te délivrer.» Elle recracha immédiatement ce qui lui restait dans la bouche. «Après, c'est à toi de l'accepter»Elle reposa la tasse et posa une main sur son ventre. Ce n'était qu'un de ses nombreux voyageurs s'étant arrêté dans une maison de passe. Avait-il eu pitié d'elle ? Comment pouvait-il savoir si sa condition s'améliorerait si elle se retrouvait enceinte ? Une fois de plus, son regard se tourna vers la décoction. Elle tenait là une petite chance de s'en sortir... Elle n'allait pas la laisser passer.
    Se levant, elle pris la tasse et renversa son contenu par la fenêtre.

     


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